A tout hasard, la page sur Hominidés.com au sujet de la bipédie, http://www.hominides.com/html/dossiers/bipedie.html ... est une très mauvaise page. A vouloir rédiger très (trop) synthétique elle n'évite pas les raccourcis ni les mauvais résumés, et laisse une sensation de n''importe quoi en vrac, qui détone avec d'autres pages mieux foutues du même site.
Par exemple, "la bipédie ancestrale ou originelle" n'est pas une idée nouvelle, elle date du début du XXe siècle, et est en fait 2 et même 3 propositions bien différentes : celle des loufs qui parlent de bipédie ancestrale chez un
proto-vertébré à gros cerveau lui permettant de flotter dans l'eau... et celle de Deloison, qui propose une bipédie chez les
proto-primates, que seul l'homme aurait conservée. Cette dernière hypothèse est moins louf que la première, mais à peine moins. La 3me "bipédie ancestrale*, concerne l'idée que les
proto-hominidés seraient déjà +/- bipèdes. C'est celle dont on parle dans cette page - qui est très raisonnable à condition de bien positionner ces primates proto-hominidés comme d'anciens arboricoles eu aussi.
Les deux premières propositions ne tiennent pas debout, la toute première carrément abracadabresque. Mais bon, ça c'est pour avertir que cette page en question n'est pas une référence de base, elle ne se sert que de citations tronquées donnant une mauvaise image de l'anthropologie et primatologie à ce sujet. Notamment la citation de Pascal Picq, qui donnée juste au-dessous du court résumé de Deloison, inviterait à croire que Picq soutient la bipédie ancestrale de Deloison, alors que ce n'est pas le cas.
- Deloison => 2me hypothèse (la sienne).
- Pascal Picq => la 3me = proto-hominidés issus d'arboricoles et déjà +/- bipèdes...
Là où je veux en venir, c'est à quelques éléments en vrac eux aussi, un peu à la manière fusionnelle de
Hans Ramadan, mais qui peuvent alimenter une bonne réflexion personnelle à la maison, et non à sens unique : bipédie, ça ne signifie pas grand chose tel quel, - pas plus que
quadrupédie en réalité -, car une assez grande proportion de vertébrés sont constamment bipèdes mais avec différents modes de locomotion et différentes positions du corps. Les kangourous sautillent pieds joints et les archosaures (dinos + oiseaux) se dandinent ou courent vélocement, tous avec le corps bien horizontal, alors que seuls les humains et quelques autres primates, ainsi que les manchots sont érigés lors qu'ils se déplacent en mode bipède.
Tout cela pour rappeler que si bipédie c'est techniquement "marcher ou courir sur deux pattes arrière", c'est aussi, plus indirectement mais techniquement tout de même : verticalité ou horizontalité du corps, station bipède et/ou marche occasionnelle ou fréquente, position ou station érigée récurrente ou occasionnelle, ce pour différents comportements moteurs... dont le déplacement. Les primates les plus anciens, si l'on s'en tient au prototype que reflètent encore peu ou prou les lémuriens modernes ainsi que pourquoi pas les tarsiers, ont déjà adopté une
verticalité du corps assez récurrente et confortable (les tarsiers p.e. dorment ainsi), lorsqu'ils se tiennent accrochés aux troncs d'arbres verticaux. Idem pour pas mal de rongeurs arboricoles, qui comme les primates, ont aussi adopté la position debout ou assise sur l'arrière-train, pour manger par ex. Une certaine corrélation entre verticalité fréquente du corps et repos en position assis sur l'arrière-train, le corps érigé, peut être notée. Corrélée à son tour à la vie arboricole dans une certaine mesure, ainsi qu'à la libération des bras pour effectuer d'autres actions.

Ce tarsier n'est pas un lémurien mais plutôt un taxon frère du nôtre (simiiformes). On ne le voit pas dans la photo, mais il a un développement des jambes extrême, lui permettant de faire des bonds incroyables d'arbre en arbre. Un exemple "typique" d'adaptation à la vie arboricole et nocturne (ses énormes yeux, fait assez rare chez les primates qui sont très majoritairement diurnes, et voient très mal la nuit tout comme nous). Un exemple parmi tant d'autres de vie +/- "verticale"

Macaque japonais.

Un écureuil commun (rongeur). Ici c'est un autre exemple de position verticale assise assez fréquente, et même bipède parfois, mais sans locomotion bipède. Ainsi que d'utilisation des mains assez préhensiles malgré que le pouce ne soit pas opposable, pour tenir la nourriture dans ses mains. Tous les rongeurs ou presque ont ces mêmes aptitudes - exceptés les rongeurs très terricoles. En fait, la plupart des rongeurs grimpent aussi très bien. Ils sont eux aussi un mode de fonctionnement assez "hybride". Ca libère bien les mains de se reposer assis, bien que les écureuils ne fabriquent pas d'outils (nan, c'est vrai ?).

Un suricate africain (carnivore herpestidé). Animal social, il guette en position debout durant des heures, comme à l'armée, chacun son tour de garde. On pourrait mettre des exemples de marmottes (rongeurs) de belettes ou loutres (mustélidés), et sans oublier les ours : ces derniers se lèvent souvent sur leurs pattes pour humer l'air p.e.

Elephant, souvent debout pour le mian-miam.

Gazelle-girafe. Elle aussi debout sur la pointe des sabots (digitigrades) pour cause de miam miam

Bouquetin. Debout pour cause de combats rituels. Comme la plupart des bipèdes occasionnels, elle peut si besoin est effectuer de courts déplacements sur les 2 pattes.
Bref, les exemples de positions et déplacements souvent érigés, verticaux, bipèdes plantigrades ou digitigrades, ne manquent pas et notamment chez les mammifères. Sans parler de l'importance que pouvoir s'ériger représente pour une bonne copulation en mode "traditionnel". Plus qu'une tendance et une habilité, c'est parfois une nécessité.
Maintenant, où vais-je avec ces choses que tout le monde sait déjà ? J'en sais rien car je l'ai oublié en cours de route en cherchant des images. P'tain, j'ai oublié la chute. C'était une belle chute en plus, très chouette et scientifique !

Merde. Ok, pas grave, je vais la remplacer par une autre chute.
Avez-vous déjà essayé de marcher sur une branche entre deux arbres, en balançant les mains comme les gibbons ? Bé, essayez. Vous verrez que sa bipédie est loin d'être maladroite sur les branches (comme au sol). Ses bras en balanciers (on balance aussi les nôtres !) ça fonctionne à merveille : les gibbons ne perdent jamais l'équilibre.
Avez-vous déjà essayé de faire tomber un pigeon ou un paon en le poussant latéralement ? Bé, là aussi : les oiseaux ne tombent pas sur le côté. Équilibre dynamique + réflexes s'approchant de la perfection. Pour vous en convaincre, comparez en faisant comme moi : poussez par surprise un dindon latéralement, puis essayez sur votre belle-mère, ex ou future, en haut des escaliers. Vous verrez bien qui tombe en premier.
Bref, la colonne vertébrale en S de l'homme sapiens est un accident qui a sans doute permis une position debout plus confortable, avec des conséquences et déficits ailleurs pas encore résolus, mais faut se rendre à l'évidence que la position érigée et la bipédie ont précédé notre courbure vertébrale caractéristique (et autres modifications mineures) et que maintenir l'équilibre debout, sans queue, ni bons balanciers, ni ailes pouvant le rétablir ipso facto, n'est pas d'une efficacité redoutable.

Gibbon